Les musulmans de Bosnie
Les musulmans de Bosnie sont de la même ethnie slave que les Serbes et les Croates, authentiques européens du sud de la péninsule balkanique. Ils parlent la même langue et ont connu une histoire analogue jusqu’au XVe siècle (1463) quand la Bosnie du Moyen-Age devint une province de l’Empire Ottoman (pachalik), et qu’ils adoptèrent l’Islam.
Historique
La Bosnie fut administrée comme une province ottomane jusqu’à l’occupation autrichienne en 1878 qui pour conquérir cette province plongea la région dans la guerre. 150 000 Bosniaques [1] périrent et autant furent contraints d’émigrer vers la Turquie.
La Bosnie fut ensuite annexée par l’Empire austro-hongrois ; A la fin de la guerre, après l’effondrement de l’Empire, la dynastie serbe des Karadjorjevic (qui avait absorbé le Monténégro) créa le Royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes dont ni les slaves musulmans, ni les macédoniens, ni les autres minorités slaves n’eurent de représentation et ce jusqu’en 1924 date à laquelle le roi Alexandre impose son pouvoir absolu sur l’ensemble du pays. En 1929, l’unité territoriale de la région fût même supprimée puis rétablie pendant la seconde guerre mondiale quand le comité de libération nationale de Bosnie-Herzégovine constitua une ensemble fédéral rassemblant, avec les mêmes droits, les citoyens musulmans, serbes et croates dans le cadre d’une fédération yougoslave démocratique dans les frontières de 1918. En 1992 la république de Bosnie fût acceptée dans ce cadre territorial comme membre des Nations-Unies Mais c’était sans compter sur la résurgence du nationalisme Serbe qui refusant l’indépendance de la Bosnie, programme le dépecage ethnique et géographique de la Bosnie, projet qui a entraîné en 1992-1995 le cortège d’horreurs de la guerre abominable que l’on connaît. Les milices serbes de Bosnie et l’armée de Milosevic planifie cyniquement la « purification ethnique » recevant l’ordre de tuer le plus de musulmans possibles accompagnée de massacres, pillage, expulsions, viols et camps d’internement.
Suite au génocide de Srebrenica, en novembre et décembre 1995, les accords de Dayton, sont signés divisant la Bosnie en deux entités politiques : La Fédération croato-musulmane (Croates et Bosniaques) et la République serbe de Bosnie (Serbes).
Douze ans après la fin de la guerre, les tensions n’ont de cesse. A la revendication d’indépendance des serbes de Bosnie et des Albanais de Serbie s’ajoute une crise économique et des ressentiments ethniques conséquents à la guerre.
Entente
Petit pays enclavé entre la Croatie et la Serbie, la Bosnie a servi de tampon et de pont entre ces deux nations, l’une catholique et l’autre orthodoxe qui ont toujours eu quelque mal à s’entendre. La Bosnie à toujours eu sur son territoire des ressortissants de ces deux peuples (Selon le recensement de 1981, il y avait en Bosnie 48% de Bosniaques, 32% de Serbes et 18% de Croates. Les 2% restants correspondent à diverses minorités) et malgré cette grande disparité culturelle, elle a une tradition de cohabitation pacifique. Elle constitue une unité territoriale et une population dont le brassage social et ethnique n’existe nulle part ailleurs en europe qui ont toujours vécu en bonne entente et n’ont jamais connu les guerre de religion qui ont ensanglantées lEurope durant des siècles. Ce furent toujours les épiphénomènes des grands conflits extérieurs qui ont semé le trouble. Cette leçon de coexistence n’est pas accepté par les puissants qui ne cherchent nullement la paix. Les animosités et les durcissements actuels sont la conséquence de l’agitation récente qui n’est que l’accomplissement de desseins séparatistes qui ne veulent pas d’un état musulman en Europe.
Islamisation
A partir du XIV° siècle, les Ottomans (c’est à dire les Turcs) conquièrent progressivement l’Europe de l’Est, notamment le Kosovo et la Bosnie-Herzégovine et parviennent jusqu’aux portes de Vienne.
C’est tout d’abord la noblesse bosniaque d’origine catholique puis bogomilienne (hérésie chrétienne née au IX° siècle en Bulgarie puis largement implantée en Bosnie. ) qui s’islamise suivit plus tard par des nomades chrétiens serbisés. La conversion à l’Islam n’étant pas formellement obligatoire, la plus grande partie des Serbes et des Croates refusent de se convertir. Il y a donc toujours trois peuples en Bosnie en cette fin du Moyen-âge : Musulmans, Serbes, et Croates sous le règne Ottoman.
Comme dans tous les pays du monde, quand l’islam s’installe, ses voies de sainteté parachèvent de l’enraciner profondément. Ainsi, la véritable islamisation de la Bosnie prend racine dans la spiritualité. Des confréries soufies y sont implantées depuis le XVe siècle c’est-à-dire depuis qu’elle est une province de l’Empire Ottoman, confréries qui n’ont jamais cessé d’exister. Opprimées parfois par les autorités religieuses et surtout par les autorités communistes, entre 1943 et 1979 elles ont subsisté clandestinement. L’Esprit ne meurt pas et aucune force matérielle ne peut prévaloir contre lui.
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[1] Un nom ancien désigne les musulmans de Bosnie : les Bosniaques. A l’époque du régime communiste, ce terme était évité parqu’il impliquait que les Musulmans étaient originaires de la région et pourraient ainsi se prévaloir de plus de droits sur la Bosnie que les deux autres nations. Ce n’est qu’avec le recensement de 1971 que pour la première fois, les Bosniaques purent se déclarer Musulmans avec le statut d’une nationalité qui jusque là était « indéfini » Au cours de cette période (en 1971 précisément), les Musulmans de Bosnie se voient enfin reconnaître le statut de nationalité, accédant ainsi à la reconnaissance qu’ils attendaient depuis si longtemps. Ainsi, quand on parle de Musulmans, en Bosnie, il s’agit bel et bien d’une nationalité, avant d’être une religion. Voila pourquoi on écrit Musulman avec un M majuscule, alors que pour la religion on écrira musulman avec un m minuscule. En 1992, au moment de l’indépendance, les Musulmans se choisissent un autre nom, car ils trouvent à juste titre que le terme « Musulman » sonne trop religieusement. Le « Musulman » devient donc « Bošniak », terme qui se prononce « bochniaque » et que les Français ont traduit maladroitement par « bosniaque ». « Bosniaque » et « Musulman de Bosnie » sont donc synonymes, en principe. Mais la plupart des journalistes se trompent et appellent « bosniaques » tous les habitants de la Bosnie. Alors qu’en principe, les Bosniaques sont les Musulmans de Bosnie. Pour désigner les habitants de la Bosnie dans leur ensemble, il conviendrait plutôt d’utiliser le terme « Bosnien » (beaucoup de controverses sur ce sujet, pour plus de détails lire : Habitants de Bosnie).
Texte élaboré à partir de « confluences Méditerranée n°6 1993, p. 109 « la Tragédie de la Bosnie-Herzégovine » de ivan ikekovic chez l’Harmattan et diverses sources internet.

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